Il était une fois, un représentant du fromage qui a fait grand bruit il y quelques années et qui s’est ensuite discrètement invité sur nos pizzas, lasagnes, cheeseburgers et autres plats industriels : le fromage de synthèse.
Le fromage, cet aliment si cher à notre patrimoine français, fondant en bouche, que l’on apprécie tant, ne fait pourtant pas l’unanimité chez tout le monde. Divisé entre les intolérances au lactose très répandues dans la population mondiale, mais également les allergies, entre le coût écologique de l’élevage industriel et l’arrachement exercé sur les vaches laitières, consommer du fromage s’avère être à la limite du luxe, on pourrait même bientôt parler de privilège.
On connait déjà l’existence de fromages végétaux, censés imiter au maximum la texture et le goût des vrais, mais il reste tout de même compliqué de pouvoir rivaliser et comparer ses produits, de qualité réduite tout de même, à des catégories de fromages tels qu’un Camembert, ou un Reblochon par exemple.
Le fromage de synthèse, c’est quoi ?
Une équipe de chercheurs en biologie, installée dans la baie de San Francisco, a eu l’idée et l’ambition de développer un fromage, dit de « synthèse ».
Leur but est simple, en résumé : utiliser de la levure et la modifier génétiquement afin obtenir des protéines de lait. Cette matière serait ensuite utilisée pour pouvoir reconstituer un lait vegan, tout en rajoutant de l’eau, de la matière grasse (huile végétale) et du sucre. On utilise ensuite ce lait afin de fabriquer du fromage, tout en respectant les techniques de confection propres aux différents fromages.
Le processus est entièrement vegan (mode de vie fondé sur le refus de l’exploitation et de la cruauté envers les animaux), c’est à dire que strictement aucune substance animale n’est utilisée pour obtenir les protéines de lait. Il s’agirait donc en réalité de vrai fromage, mais confectionné à partir d’une matière première créée artificiellement.
Moins couteux, plus facile à conserver
Le fromage artificiel est facile à conserver et à manipuler, mais c’est également et avant tout, un produit moins cher. Certains grossistes assurent même qu’il coûterait 40 centimes de moins au kilo qu’un fromage premier prix.
Certains fabricants révèlent même, à travers le net, la composition probable de ce « faux fromage » :
- eau
- matière grasse végétale
- sel fin
- acide lactique
- sorbate de potassium
On peut ainsi en déduire que ces substituts sont utilisés très certainement du fait qu’ils soient moins coûteux que le fromage. Par exemple, le lygomme coûte 60 % de moins pour les industriels que le précédent fromage analogue (une pâte composée de 15 % de protéines laitières, d’huile de palme et d’exhausteurs de goût) et près de 200 % de moins qu’un vrai fromage.
Ce fameux lygomme, est alors détourné comme une innovation favorable à la santé du consommateur en mettant en avant la non présence de lactose dans le lygomme, ni de graisses animales et peut convenir ausi bien aux intolérants au lactose qu’aux végétariens.
Une pratique trompeuse
Le fromage analogue n’est pas uniquement réservé qu’aux professionnels, il n’est donc pas rare de le retrouver également dans les gondoles de nombreux supermarchés, aux rayons des fromages à pizza notamment (à base de Mozzarella, quatre fromages…) et à celui des fromages râpés.
Les sachets de 100 ou 200 g de fromage râpé que l’on retrouve dans ces rayons contiennent généralement du fromage authentique. Au contraire des emballages plus conséquents (500 g, 1 kg ou plus), notamment les moins chers, qui eux n’ont vraisemblablement rien à voir avec la production laitière d’une vache.
Ces produits sont naturellement importés en France notamment à travers les pizzas congelées. Les Allemands sont les premiers producteurs de pizzas surgelées, alors que les Français sont les premiers consommateurs européens de pizzas.
La Commission Européenne a néanmoins autorisé l’utilisation de ce fromage analogue à condition que les ingrédients qui le composent soient indiqués sur l’étiquette des emballages. Mais il s’avère tout de même assez rare qu’un consommateur surveille avec beaucoup d’attention le moindre détail inscrit sur ces étiquettes. Le consommateur ignore donc la plupart du temps qu’il a affaire à une imitation et se fie souvent au visuel proposé sur l’emballage.
Il est donc dangereux d’induire en erreur le consommateur car selon les fabricants, il n’y a pas de lactose ni de graisse saturée, mais il s’agit cependant d’un produit sans calcium, alors que ce dernier est l’une des caractéristiques principales du fromage. Surtout lorsqu’on sait que le calcium est l’élément le plus abondant de l’organisme et qu’il est nécessaire pour la bonne croissance osseuse des enfants et des adolescents, il reste donc évident que ce fromage là n’est pas un atout sanitaire.
On vous invite également à découvrir toutes les vertus du fromage dans l’un de nos précédents articles.
Création américaine
Ce « fromage analogue » n’est pas une nouveauté : il est apparu en 2007, avec la flambée du prix du lait… En 2007, en effet, le prix des produits laitiers a battu des records : la matière première de l’industrie laitière est alors de 20 à 25 % plus chère qu’en 2006. Certains producteurs agroalimentaires en ont profité pour imposer leurs «innovations».
Cargill, un fabricant américain de produits pour l’industrie agro-alimentaire implanté dans 63 pays et basé dans le Minnesota, à Minneapolis, invente alors le fromage analogue : une pâte composée de 15 % de protéines laitières, d’huile de palme et d’exhausteurs de goût. A partir de 2009, on trouvera aussi sur le marché un autre substitut de fromage appelé « Lygomme ACH Optimum » destiné au marché européen et composé de trois amidons, de galactomannane (E 410,412, 417), de carraghénane (E 407), qui sont tous deux gélifiants, et d’arômes.
Crédit photo : Emilie Ogez